19 juin 2020
5
19
/06
/juin
/2020
16:23
Voici une lettre que je me serais fait un plaisir d’écrire en qualité de mère d’élève et d’enseignante dans les circonstances actuelles !
Etayée et construite à partir des témoignages recueillis auprès d’ami(e)s enseignant(e)s ou employé(e)s de tous horizons, cette lettre est ma contribution personnelle pour dénoncer la gestion chaotique de la crise que nous traversons dans un domaine qui fut le mien, que j’aimais, l’enseignement !
Lettre à Messieurs Macron et Blanquer
Messieurs,
Lorsque le 5 mars vous nous assuriez que les écoles ne fermeraient pas en cas de passage au stade 3 de l’épidémie de Coronavirus, je me suis sentie à la fois rassurée et étonnée ! Quelques jours plus tard vous réitériez assurant que la stratégie du gouvernement pour endiguer l’épidémie ne passait pas par une fermeture générale des écoles. Le 13 la messe était dite, les établissements scolaires fermaient ! Pour autant nous étions prévenus, ce n’étaient pas les vacances et les enfants allaient devoir travailler. Nous étions en « situation de continuité pédagogique [ … ] » et cela avait même un nom : La nation apprenante.
Nous nous sommes tous retrouvés, enseignants, parents, enfants au pied du mur du jour au lendemain. Nous avons retroussé nos manches.
Aujourd’hui si de nombreuses familles adressent un grand merci au corps enseignant pour la qualité de son engagement, son professionnalisme, son dévouement (voilà au moins un plus à mettre au crédit du COVID), en vertu de mes « deux casquettes » mère de famille et enseignante, je ne peux pas vraiment en dire de même pour vous !
Que nous soyons parents ou enseignants, nous avons patouillé et durement peiné à la tâche.
Être enseignant ne s’improvise pas, ministre, président, je ne sais pas. Je doute ! Pour ce qui est d’une certaine porte-parole du gouvernement là je n’ai que des certitudes.
Confinés mais continuant néanmoins à travailler à domicile, beaucoup comme moi ont dû développer des trésors d’ingéniosité pour arriver à mener de front toutes ces casquettes ! Faire la classe à ses propres enfants, préparer les cours pour ses élèves, corriger le travail, rassurer les parents. Dire qui m’étais jurée de rester anonyme, à l’heure actuelle tous les parents d’élèves ont mon numéro de portable et comme il n’y a pas d’heure pour les braves, le téléphone sonne même tard le soir !
Il n’a pas été aisé d’expliquer la situation aux enfants, de gérer leur stress ! Allez leur faire comprendre ce que cache les mots « porteur sain ». Comment leur dire que bien qu’en pleine santé ils sont suspectés de porter la mort. Finies les cellules psychologiques qui fleurissaient à tout bout de champ avant, on a fait sans.
Le temps a passé, nous nous sommes vaille que vaille adaptés
Quand le déconfinement est intervenu la pression n’est pas retombée pour autant. Les conditions de réouverture des écoles singulières et anxiogènes ne m’ont pas fait regretté le cumul d’emplois du confinement, hors de question de devoir imposer une telle situation à mes propres enfants. Nous avons bien compris que le but était de relancer l’économie, sinon pourquoi ré-ouvrir les crèches, les écoles et pas les lycées ? Les ados se gardent seuls, eux !
La boule au ventre j’ai repris le chemin de l’école, que je n’avais pas vraiment abandonné puisque nous assurions des permanences à l’école, certains enfants aussi ! Quelle déconvenue pour eux ! Retrouver ses copains mais ne rien pouvoir partager, échanger, de peur d’être contaminer, d’infecter. Pas de jeux collectifs, interdiction de prêter ses affaires.
Des classes dévastées, des enseignants masqués !
Je n’ai pas regretté d’avoir choisi de confier ma propre progéniture à la famille dès que la liberté de circuler a été acquise et c’est avec plaisir que je les vois s’ébattre au grand air loin de cette folie que vous contribuez à alimenter.
Alors je vais vous dire une bonne chose, puisque les résultats scolaires de mes rejetons sont excellents et leurs passages dans les niveaux supérieurs acquis, il n’y aura pas pour eux de retour à l’école le 22 juin.
Obligatoire ou pas, je m’en tiendrai à une seule ligne de conduite, choisir ce qui est le mieux pour eux. Pas de valse hésitation en ce qui me concerne, pas comme vous et vos positions fluctuantes !
L’Education Nationale n’était pas bien portante, elle est à ce jour moribonde. Vous et vos prédécesseurs en êtes responsables !
Alors menacez nous de nous supprimer les allocations (il faut quand même plus que deux semaines d’absence), honnêtement je m’en moque, mes gamins ne reprendront le chemin de l’école qu’en septembre ! Ils ont bien mérité leurs vacances !
Et en ce qui me concerne, ne comptez pas sur moi pour les » vacances apprenantes ». J’ai donné et plus que de raison et j’espère que le corps enseignant dans son ensemble partagera mon opinion et se gardera de répondre à votre requête !
Veuillez croire en l’expression de mon profond non respect !